Une œuvre invisible, inodore, impalpable, bref inexistante. Enfin, pas tout à fait. Après avoir essuyé un paquet de critiques dans la presse italienne, Salavator Garau s’est expliqué. Voilà comment il perçoit son œuvre intitulée « Io sono » (Je suis):
« Je n’ai pas vendu un ‘rien’, mais un vide. Ce n’est rien d’autre qu’un espace plein d’énergie. Si nous le vidons et qu’il ne reste rien, selon le principe d’incertitude d’Heisenberg (un concept de la mécanique quantique), ce vide a un poids. Il se condense et se transforme en particules, et se fond ainsi en nous. »
Et il va même plus loin : pour exposer « Io Sono », il faut que la galerie qui reçoive l’œuvre prévoie un espace de 150 cm sur 150 cm, afin de « concentrer la quantité de pensées sur un point, créant ainsi une sculpture qui prendra les formes les plus diverses… » Je me réjouis de voir débarquer la police chez moi en me disant que l’espace vide de mon salon est une contrefaçon de cette sculpture.
Vice de forme
Et l’artiste d’ajouter : « Après tout, ne sommes-nous pas en train de donner forme à un dieu que nous n’avons jamais vu ? » Philosophiquement, ça se tient. Physiquement, un peu moins, puisque si son œuvre nécessite un espace de 150 cm sur 150 cm, il s’agit d’une surface et non pas d’un volume. C’est un dessin, pas une sculpture. Je laisse les juristes en herbe voir s’il n’y a pas moyen de se faire de l’argent avec ça. Bref, « Io Sono », sculpture invisible de Salvatore Garau, a été vendue aux enchères cette semaine pour plus de 16’000 CHF. La personne qui l’a achetée est un génie, de l’art ou de l’arnaque, c’est comme vous voulez.