FlexFab collabore avec le rappeur kenyan Ziller Bas sur son nouvel EP

12 juin 2020

Interview

Après une tournée en Afrique de l’Est en 2019, le producteur de musique électronique suisse FlexFab a décidé de collaborer avec le rappeur kenyan Ziller Bas. Avec leur projet MUGOGO!, ils proposent un mélange étonnant de musique club africaine, d’électro, de bass music et de rap.

L’EP MUGOGO! part 1 sort aujourd’hui. L’album complet sera publié à la fin de l’année. Le trailer du documentaire retraçant l’enregistrement de ce disque au Kenya en janvier dernier est disponible sur YouTube.

GRRIF : Est-ce que tu peux nous décrire MUGOGO! ?

FlexeFab : C’est le nouveau projet que j’ai avec le rappeur Ziller Bas de Kilifi au Kenya. Je suis donc aux manettes de la prod, de la compo, des arrangements, des visuels, etc. Ziller Bas, lui, accompagne tout ça en swengflow : un mélange de swahili, d’anglais et de sa langue natale, le giriama.

Comment as-tu rencontré Ziller Bas ?

Lors d’une résidence en Afrique de l’est en octobre dernier. J’étais à Nairobi, j’avais été invité par le collectif Flee pour expérimenter et travailler en studio avec des artistes kenyans et européens durant plusieurs semaines. On est également tous partis en tournée dans tout le Kenya et en Ouganda.

C’est durant un de mes shows, dans la ville côtière de Kilifi, que j’ai fait la connaissance de Ziller Bas. En plein milieu de mon set live, il est venu me demander si c’était possible de brancher un micro et de freestyler sur mes prods. La suite, on la connaît!

« C’est un genre de sensation que j’ai eu rarement en faisant
une session freestyle… ce moment où tout s’imbrique »

Vous avez les deux une approche musicale assez percutante… qu’est-ce que tu as ressenti au moment où il improvisait lors du concert ?

Aaaah! C’est le genre de sensation que j’ai rarement eu en faisant une session freestyle… ce moment où tout s’imbrique musicalement, au niveau des énergies aussi, bref le combo parfait. Les personnes qui étaient là l’ont ressenti, et celles qui ont déjà vécu ce genre de moments suspendus me comprennent !

Six mois plus tard tu décides de retourner sur place pour enregistrer un album avec lui. La solution de facilité aurait été de travailler à distance…

Un de mes mots d’ordre, dans la musique, c’est d’essayer au max de sortir de ma zone de confort. C’était aussi la bonne occasion de mieux se connaître et de pouvoir tenter de construire ce nouveau projet à deux . Ce n’est pas juste FlexFab qui fait rapper un MC kenyan sur un de ses morceaux, ou le rappeur Ziller Bas qui rappe sur des prods de FlexFab. C’est vraiment FlexFab et Ziller Bas qui présentent leur nouveau projet, MUGOGO!

Une autre réalité, c’est que Ziller a difficilement accès à un “vrai” studio d’enregistrement dans sa ville. Et il n’a pas la possibilité de sortir du Kenya actuellement.

« Il faut nous imaginer avec nos bagages pas pratiques dans les petits avions à hélices du Kenya »

Sur place vous n’avez pas pu enregistrer dans des conditions idéales. Peux-tu nous décrire l’environnement et comment vous avez réussi à enregistrer malgré tout ?

J’ai emporté un micro avec moi, des haut-parleurs, mon ordi et quelques machines. On a réussi à acheminer ça jusqu’à Kilifi. Il faut nous imaginer avec nos bagages pas pratiques dans les petits avions à hélices du Kenya, dans les vols locaux (rires). C’était super !

Concernant l’environnement d’enregistrement, alors certes ce n’était pas silencieux. On était en plein milieu de la nature – avec des sons de grillons et d’autres bestioles sur tous les enregistrements – et dans une maison sans fenêtres. Mais cette maison était superbe. Pas de voisins. On a pu faire du son 24 heures sur 24, c’était parfait!

« Dépaysement total: on était en janvier et il faisait genre 30°C »

Quatorze morceaux et trois clips en deux semaines, vous n’avez pas chômé. Comment s’est passée la collaboration avec Ziller Bas ?

Je ne sais toujours pas comment on a fait… surtout qu’on s’était mis comme objectif de faire trois ou quatre sons sur les deux semaines. Il faut aussi savoir qu’on n’avait aucune idée sur la réussite de notre collaboration ! Faire un freestyle sur une scène, c’est une chose, mais travailler en studio à deux 24 heures sur 24 pendant deux semaines sur un album implique beaucoup plus de facteurs. Il y a tout un équilibre à mettre en place: trouver la bonne façon de travailler; laisser suffisamment de place à l’autre tout en essayant de trouver la sienne, etc.

Et par-dessus tout, il y avait un dépaysement total: on était en janvier, il faisait genre 30°C, on était dans un village sur la côte, avec une nouvelle culture à apprendre, à comprendre, à respecter. Bref, une sortie de zone de confort et une prise de risque comme je les aime. Parfait pour provoquer le miracle de la déesse créativité (rires)!

Est-ce que MUGOGO! sera aussi un projet que vous allez porter sur scène ?

Oui à fond, c’est l’idée. Avec la situation actuelle, il est impossible pour Ziller de venir ici faire des shows, mais on croise les doigts pour qu’on puisse faire une première série de concerts en fin d’année. L’idée est de sortir le reste des morceaux à ce moment-là, et donc de faire une release party, ici en Europe, et également une à Kilifi.