Elle a passé sa vie à se battre contre les crimes et violences envers les femmes. La sociologue sud-africaine Diana E. H. Russell est décédée mardi en Californie à 81 ans, apprenait-on jeudi. Lors de ses études au Royaume-Uni puis son doctorat à Harvard, elle se passionne pour le mouvement anti-Apartheid, car cette politique particulièrement durement mise à l’œuvre en Afrique du Sud a émergé dès les années 1940 alors qu’elle était enfant.
Nommer le féminicide, ou lutter contre les hommes anti-femmes
À partir de 1977, à 39 ans, Diana mène 900 entretiens avec des femmes dont elle a tiré plusieurs essais et articles scientifiques – dont la première étude sur l’inceste. Mais surtout, c’est elle qui redéfinit et popularise le terme de « féminicide », à savoir « ces meurtres de femmes commis par des hommes parce que ce sont des femmes, […] motivés par la haine, le mépris, le plaisir ou le sentiment d’appropriation des femmes ». Tout à coup, un événement, une chose, un crime malheureux mais accepté devenait un fait politique que l’on pouvait pointer du doigt pour sa misogynie. Car comme le dit son avis de décès, « des termes non-genrés comme ‘meurtre’ » ne rendent pas compte de l’identité de femme assassinée. Or cela leur est dû. Depuis l’avènement du terme, de nombreux mouvements féministes l’ont disséminé dans leurs réseaux et leurs discours.
Un activisme acharné et productif
En 1976 à Bruxelles, Diana E. H. Russell participe à la création d’un tribunal international des crimes commis contre les femmes. C’est l’auteure française et féministe Simone de Beauvoir qui en a écrit le message d’ouverture. Jusqu’à sa retraite au début des années 2000, la Sud-Africaine n’a eu de cesse de théoriser des actes commis envers les femmes pour les dénoncer. Des violences sexuelles au viol conjugal en passant par la pornographie, rien n’a été accepté. Après une vie d’activisme, Diana E. H. Russell avait décidé d’écrire ses mémoires. Ceux-ci resteront inachevés mais nous ne doutons pas qu’ils seront en moins en partie publiés. Alors à la mémoire d’une femme extraordinaire, et pour toutes celles qu’elle n’a pas réussi à sauver.